Histoire de la faluche

À la fin du Second Empire s'opère une réorganisation de l'enseignement supérieur. Ceci a pour conséquence immédiate la renaissance de la vie étudiante, hautement développée au Moyen-Âge. Avec le développement des écoles nationales supérieures civiles et militaires, on voit les facs se remplir non plus de vénérables auditeurs de cours publics, mais de véritables jeunes hommes de 18 à 25 ans (et non, les demoiselles n'étaient pas encore autorisées à étudier). Ces étudiants sentent bientôt la nécessité de se grouper en corporations pour défendre leurs droits et affirmer leur existence : c'est alors qu'apparaissent les premières sociétés d'étudiants. Elles furent d’abord fondées à Nancy en 1876, et à Lille en 1878. En 1884, une loi réglementant le syndicalisme est publiée. Le monde étudiant va alors se montrer réceptif aux idées d'associations.

Cette même année, le journal "Le Cri du Peuple" publie un article déclarant que l'étudiant "ne s'affirme guère que par une indécence de babouin, greffée sur une bêtise de rhinocéros". De violentes manifestations, suivies de bagarres, eurent alors lieu devant le journal. Il y a donc nécessité pour les étudiants de répondre collectivement, et de parler au nom d'un groupement : l'Association Générale des Étudiants, communément appelée l'A, voit alors le jour. On peut aujourd'hui retrouver son histoire à travers son journal, qui avait pour slogan "L'A, le premier journal par ordre alphabétique".

Les fondateurs sont quelques élèves de médecine, présidés par Bourrelier (ou Boureau), puis par Delcambre (Sciences). La grande solidarité escholière du Moyen-Âge hante les mémoires : l'esprit de solidarité et de défense des intérêts étudiants se développent. De 1886 à 1891, les étudiants des villes de Montpellier, Lyon, Toulouse, Aix, Rennes, Nantes, Grenoble, Dijon, Caen, Besançon... se dotent d'AGE.

Très vite, des relations internationales s'ébauchent : c'est ainsi que le 12 juin 1888, les étudiants français sont invités aux 800 ans de l'Université de Bologne. Cinq membres de l'A sont envoyés en délégation.

Là, avec leurs vêtements sombres égayés d'une cocarde à la boutonnière et d'un ruban en sautoir aux couleurs de la ville de Paris, "dans la plus grande rencontre de costumes et de coiffes écolières du monde", ils se sentent "pauvres". En  effet, on pouvait y voir défiler toutes les formes de costumes et de coiffes des étudiants européens : les pennes des étudiants belges des facultés laïques, les calottes de leurs confrères des facultés catholiques, les espagnols et les portugais arborant les "tunas" et leurs capes à rubans (signe d'appartenance à une faculté précise) les coiffes allemandes, les larges casquettes plates sans rebord, et les minces képis à petite visière des suisses... C'est pourquoi, on dit qu'ils adoptèrent le béret des habitants de la région bolognaise, comme coiffe spécifique aux étudiants français, en souvenir du congrès qui fut, paraît-il, magnifique. Ils le ramenèrent à Paris le 25 juin.

C'est ainsi que naquit la Faluche. Dès lors, les étudiants forment un corps et participent à la vie officielle de l'Université, aussi bien en France qu'à l'étranger. ils défilent désormais derrière la bannière de l'AGE.

"L’Echo" des étudiants de Toulouse de 1930 comporte des illustrations de Faluchards à la Une : à n'en pas douter, la Faluche est devenue la coiffe officielle des étudiants. Mais la elle n'a pas traversé les âges sans péripéties ni évolutions. Le premier grand déclin fut sous l'occupation, pendant la Seconde Guerre Mondiale. En 1945, on assiste à un léger renouveau. Puis en 1968, la coiffe subit sa "seconde crise", du fait du refus des traditions liées à cet événement. A partir du 8 mars 1976 (synthèses des codes à Lille), on assiste à une véritable "renaissance" de la Faluche, encouragée par l'adoption d'un code national en 1986, et par le centenaire de la Faluche à Reims en 1988.

Les premières transcriptions écrites du code datent des années 60, régissant une tradition orale plus ou moins défaillante au fil des ans. Ces premiers codes permettent d'apporter des repères et des limites contre le fait que l'étudiant cherchait à remplir le velours de façon anarchique. A partir de ce moment, il existe 2 grands codes : le "lillois" et le "toulousain". Les plus anciens codes recensés sont ceux de Toulouse (mars 1966) et Paris (février 1966). Il existe également un "ancien code de Lille" non daté, mais qui selon sa propre introduction aurait été rédigé dans les années 40. Ces codes précisent de nouvelles notions, tels que les rubans associatifs, mais rien sur les emplacements exacts des insignes et des badges. Chaque ville, chaque région, adopte son propre code en fonction de son héritage culturel Faluchard, mais ils restent tous incomplets.

Les années 1968 marquent la période charnière dans l'histoire de la Faluche. En effet, la révolution de mai 68 va conduire au rejet en masse de la coiffe traditionnelle estudiantine. Dès lors, la Faluche est quasiment ignorée, à l'exception des facultés de médecine et de pharmacie, où les traditions sont fortement ancrées.

Manifestation du 11 Novembre 1940

L’histoire française est entrecoupée d’événements tragiques comme les Première et Seconde Guerres Mondiales. Ces saignées privent les nouvelles générations du savoir hérité des anciens. Pour anecdote, le 11 Novembre 1940 près de 2500 jeunes français, sous l’appel de l'Union Nationale des Étudiants, manifestent sur les Champs Elysées (certains arborent une faluche) pour rendre hommage au Soldat Inconnu et célébrer l'Armistice. Les Allemands ouvrent le feu sur les manifestants.
Jugée trop nationaliste, la Faluche est alors interdite par les Allemands (avec une tolérance pour le jour de la Saint Nicolas) qui y voient un moyen de rassemblement et de résistance (système de messages codés avec les insignes). En effet, bon nombre des étudiants préféreront lutter contre l’occupant, bravant le STO (Service du Travail Obligatoire) et les camps de concentration.

Le 11 novembre 2010, une cérémonie salue le courage des lycéens et étudiants. Une plaque en leur honneur est dévoilée par le Président de la République.